Réduction massive de l’immigration : que contient le plan « radical » du Royaume-Uni ?

Le Royaume-Uni durcit sa politique migratoire : Ce qu’il faut savoir

Face à une montée significative de l’extrême droite et à une pression croissante de l’opinion publique, le gouvernement britannique dirigé par Keir Starmer (travailliste) a dévoilé ce lundi un ambitieux plan de réforme migratoire. Le virage est clair : réguler plus fermement l’immigration légale tout en renforçant les mesures contre l’immigration irrégulière.

Contexte politique et social

Ce plan intervient dans un climat politique tendu. Le Royaume-Uni, qui a connu une immigration nette de plus de 728 000 personnes entre juin 2023 et juin 2024 (et près d’un million l’année précédente), voit les partis anti-immigration connaissant une progression notable, notamment Reform UK, dirigé par Nigel Farage, qui a engrangé des succès dans les élections locales de mai dernier.

Un système migratoire “plus juste, sélectif et contrôlé”

Keir Starmer, dans une conférence de presse tenue ce matin aux côtés de sa ministre de l’Intérieur Yvette Cooper, a annoncé une refonte complète du système d’immigration. Leur mot d’ordre : “réparer un système défaillant hérité des conservateurs”, une critique directe des politiques de leurs prédécesseurs.

Voici les principales mesures dévoilées :

  • Prolongation du délai pour la résidence permanente : il faudra désormais 10 ans de résidence continue au Royaume-Uni, contre 5 années auparavant, sauf pour certaines professions stratégiques (médecins, ingénieurs, spécialistes IA, etc.).
  • Renforcement des exigences linguistiques pour les membres de famille rejoignant un résident.
  • Réduction du nombre de visas familiaux, jugés trop élevés dans leur forme actuelle.

Visas de travail : Une réforme structurelle annoncée

Le gouvernement s’attaque également à l’immigration professionnelle en durcissant les conditions d’accès aux visas de travail, deuxième canal principal d’immigration vers le Royaume-Uni (369 000 nouveaux détenteurs en 2024).

Voici les grands axes de cette réforme :

  • Niveau de diplôme minimum relevé : équivalent à une licence française pour les travailleurs qualifiés.
  • Les entreprises devront prouver un investissement actif dans la formation de la main-d’œuvre locale avant de recruter à l’étranger.
  • Le secteur du soin à la personne, qui dépend fortement de la main-d’œuvre étrangère, se voit interdire le recrutement direct à l’international, une décision qui inquiète certains acteurs du secteur.
  • Objectif affiché : réduire de 50 000 le nombre de travailleurs peu qualifiés dès l’année prochaine.

Starmer a souligné la nécessité de “rompre avec le modèle économique basé sur l’importation de main-d’œuvre bon marché”, un discours qui vise à rassurer les électeurs laissés pour compte après des années de stagnation salariale au Royaume-Uni.

Étudiants et nationalités ciblées

Dans la continuité, le gouvernement a également déclaré vouloir restreindre les visas étudiants originaires de certains pays, le Pakistan, le Nigeria et le Sri Lanka notamment, en raison du taux élevé de demandes d’asile dans ces populations.

Une mesure controversée, car elle pourrait affecter la diversité universitaire du pays, mais qui s’inscrit dans la volonté de « filtrer plus strictement » les motifs d’entrée sur le territoire.

Immigration illégale : la Manche toujours sous surveillance

Au-delà de l’immigration légale, l’exécutif intensifie sa lutte contre les traversées illégales de la Manche. En 2023, environ 36 800 migrants ont effectué la traversée périlleuse sur des embarcations de fortune. Depuis janvier 2024, plus de 11 000 personnes sont déjà arrivées par ce biais.

Le plan comprend une volonté d’expulser plus rapidement les étrangers condamnés pour infractions criminelles. Jusqu’ici, seuls ceux écopant de peines supérieures à un an pouvaient être expulsés. Ce seuil pourrait être abaissé pour élargir le champ d’application.

Une réforme à surveiller

Ce tournant migratoire du gouvernement travailliste pourrait bien déterminer son avenir politique. Entre pression électorale, nécessité économique et aspirations sociales, Keir Starmer joue une partie serrée. D’autant que ces réformes pourraient heurter une partie de sa base électorale traditionnelle, historiquement plus favorable à une politique d’accueil modérée.

En résumé, le Royaume-Uni semble amorcer une transition vers un modèle migratoire plus contrôlé et sélectif, dans le but déclaré de promouvoir l’autonomie économique. Reste à voir si ces mesures seront applicables sur le terrain et si elles résisteront à l’épreuve du réel, tant sur le plan législatif qu’humain. Un test grandeur nature pour Keir Starmer et son équipe.

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